Etat des lieux du vieillissement dans les QPV de Bretagne et Pays de la Loire

Alors que la population française vieillit (en 2006 les plus de 60 ans représentaient 21,1% en 2006 et 26% en 2019) se posent de nouveaux enjeux afin d’accompagner ce changement des caractéristiques démographiques. Forts de ce constat et dans le contexte de la réécriture des contrats de ville, nous souhaitions, ici, questionner les dynamiques de vieillissement observées dans les QPV [1] de Bretagne et Pays-de-la-Loire.

1.   Des QPV avec moins de séniors mais avec des dynamiques de vieillissement plus marquées

Tableau 1 : situation comparée du vieillissement
60 ans et plus en 2019 75 ans et plus en 2019 Taux de croissance du tx des plus de 60 ans 2006-2019
IRIS-QPV 22,6 % 8,3 % + 29,5 %
Ecart moyen à l’unité urbaine -3,9 pt -1,7 pt + 4,9 pt
Moyenne française 26 % 9,4% + 23 %

En 2019, les QPV des deux régions ont en moyenne une part de seniors moindre en comparaison à leur unité urbaine et par rapport à la moyenne nationale (tableau 1). Cette première observation d’une moindre présence de personnes âgées ne doit pas conduire à la conclusion que les enjeux liés au vieillissement seraient moindre dans les QPV et ce pour deux raisons. En premier lieu, il faut considérer les dynamiques d’évolution puisque la part des plus de 60 ans progresse nettement plus vite dans les QPV de l’ouest que dans leur unité urbaine de référence et même qu’en France avec un taux de croissance de près de 30 % (tableau 1). D’autre part, derrière ces moyennes, il faut considérer l’hétérogénéité des territoires considérés tant sur le plan de la proportion des plus de 60 ans que de la dynamique d’évolution de cette population (figure 1).

Figure 1 : Taux des plus de 60 ans en 2019 et taux de croissance des plus de 60 ans entre 2006 et 2019 dans chacun des IRIS-QPV regroupés par unité urbaine

 

2.   Essai de typologie des QPV face à l’enjeu du vieillissement

Face à l’hétérogénéité des configurations et des dynamiques de vieillissement des secteurs politique de la ville, nous avons dégagé quatre types de territoires en fonction de la part de personnes de plus de 60 ans, de la croissance de cette proportion entre 2006 et 2019 et des écarts mesurés avec l’unité urbaine de référence. En usant de la méthode d’analyse multivariée de l’ACP [2], nous pouvons distinguer quatre groupes d’IRIS-QPV [3] révélant des configurations singulières que l’on peut résumer par ce schéma ci-contre et que nous détaillons ci-dessous en partant des secteurs où se concentrent les plus forts enjeux liés au vieillissement de la population.

 

 

Data Viz : https://datawrapper.dwcdn.net/6WNS7/2/

Des secteurs à forts enjeux (4) : Une surreprésentation dans les petites agglomérations des secteurs à forte proportion et croissance importante de la part des seniors

Environ 20% des secteurs comptent, en 2019, des proportions de seniors (31,8%) nettement supérieures aux moyennes nationales et légèrement au-dessus des moyennes locales (+3,3 pts en moyenne). Parallèlement, la dynamique de croissance de la proportion de plus de 60 ans est nettement plus importante sur ces secteurs que dans leur aire urbaine de référence (+30 pts) et avec un taux de croissance moyen très important de 53% entre 2006 et 2019. Par voie de conséquence, ces secteurs sont ceux les plus sensibles aux enjeux de l’âge.

Ces territoires à forts enjeux face au vieillissement, s’ils sont présents dans la plupart des unités urbaines étudiées, sont surreprésentés dans les agglomérations de moins de 100.000 habitants où ils représentent 50% des secteurs IRIS-QPV considérés. Ainsi, en proportion, les petits territoires sont bien plus exposés aux problématiques liées à l’accompagnement des ménages âgés.

Des secteurs avec de forts enjeux à venir (3) : une très forte croissance de la part des plus de 60 ans

A la différence du premier groupe, celui-ci se démarque par des proportions de seniors en 2019 (18%) inférieures aux moyennes locales (-9 pts). En revanche, ils se caractérise par les plus fortes dynamiques de croissance (+75,6%) sur la période 2006-2019. Ces dernières sont assez supérieures à celles mesurées à l’échelle des unités urbaines de rattachement (+50 pts). Cette plus forte croissance, si elle entraine un rattrapage rapide des proportions des plus de 60 ans par rapport à la moyenne de l’unité urbaine, doit aussi être interprétée comme un enjeu fort en matière d’adaptation de ces territoires au besoin de ces populations.

Cette configuration touche proportionnellement plus les unités urbaines entre 100.000 et 200.000 habitants et concerne quasi exclusivement les secteurs présents dans les unités urbaines de plus de 100.000 habitants.

Des secteurs aux enjeux similaires à leur dynamique locale (2) : proportion et croissance moyenne du nombre de séniors

Au sein de ce troisième groupe, nous trouvons des secteurs où la proportion de séniors en 2019 (23,8%) est proche des moyennes nationales et des moyennes locales (-2 pts). De façon similaire, la croissance de la proportion des plus de 60 ans est plus faible (+16% de 2006 à 2019) en comparaison des deux groupes précédents et légèrement inférieure aux moyennes locales. En somme, ces secteurs connaissent des caractéristiques et dynamiques similaires à l’ensemble de l’unité urbaine.

Des secteurs à plus faibles enjeux (1). Une faible proportion et une faible croissance

Enfin, 28,9% des secteurs sont caractérisés par les plus faibles proportions de seniors (16,8% en moyenne). Ces dernières sont inférieures aux moyenne locales et si dans ce groupe les dynamiques d’évolution de la part de cette population sont assez hétérogènes, elles sont, en revanche, systématiquement inférieures à la moyenne mesurée dans l’unité urbaine (-18 pts en moyenne).

Ces secteurs, plus souvent situés dans les grandes agglomérations de l’ouest, représentent les zones les moins sensibles aujourd’hui et demain aux enjeux liés au vieillissement dans les QPV.

 

3.   Part des plus de 75 ans en nette diminution : une localisation des établissements à l’extérieur des QPV

La part des plus de 75 ans est également légèrement inférieure aux moyennes locales où s’inscrivent chacun des secteurs étudiés mais la dynamique d’évolution de la représentation de cette population est inverse de celle mesurée pour les plus de 60 ans. En effet, tandis que la part de ces derniers est en nette croissance entre 2006 et 2019, celle des plus de 75 ans diminue sur la même période (-5,5%).

Cette perte, outre les phénomènes démographiques, peut s’interpréter par la localisation des établissements spécialisés dans l’accueil de personnes âgées, dépendantes ou non, puisque que dans l’ouest 95 % d’entre eux sont situés hors QPV [4], tandis que parallèlement leur capacité d’accueil augmente [5]. Ainsi, il semble que les plus de 75 ans, lorsqu’ils déménagent dans ces résidences (service, EHPAD [6], …) doivent quitter leur QPV d’origine ce qui pourrait participer à expliquer cette tendance à la décroissance de la part des plus âgés.

 


[1] Pour ne pas travailler sur la base des estimations démographiques à l’échelle des QPV publiées par l’INSEE mais sur les données exactes issues du recensement, nous avons travaillé à l’échelle des IRIS contenant ou étant compris dans un QPV

[2] L’Analyse en Composante Principale s’appuie sur le taux de plus de 60 ans, le taux de variation de cette population entre 2006 et 2019, ainsi que sur les écarts mesurés entre cette part et cette dynamique à celles observées dans l’Unité Urbaine de référence.

[3] Ces groupes ont été discrétisés à partir des proportions des plus de 60 ans et des plus de 75 ans (taux en 2019, taux de croissance entre 2006 et 2019, écarts aux moyennes de l’Unité Urbaine)

[4] https://www.data.gouv.fr/fr/datasets/etablissements-ehpad-esld-residences-autonomie-accueils-de-jour/

[5] Plus 170.000 lits entre 2003 et 2015 dans les seuls EHPAD (https://www.senat.fr/rap/r21-771/r21-77110.html)

[6] Voir l’article sur les différents types d’habitat pour séniors : Enjeux et expériences d’habitat sénior dans les QPV

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