D’abord, Thalia a flashé sur la tenue : des strass, des paillettes, et les patins à roulettes. À 7 ans, la fillette s’élance, roule, tourne puis saute, au fil des entraînements. Sa passion et son esprit de compétition l’emmèneront loin. Elle donne tout. Mais Thalia reste lucide. On ne vit pas de pirouettes. Elle a d’autres ambitions. Alors elle pose ses patins, pour prendre le chemin des études, à Rennes. Sans jamais lâcher le club de patinage artistique La Beaumanoir, à Dinan. Fière désormais d’encourager la nouvelle génération.
Nom : JEAN
Prénom : Thalia
Âge : 20 ans.
Signes distinctifs : Thalia se qualifie de « fausse timide ». Profondément motivée, elle s’investit dans tout ce qu’elle entreprend, si la passion s’en mêle.
Sport pratiqué : Le patinage artistique.
Pouvez-vous vous présenter ?
Je suis née et j’ai toujours vécu à Dinan, à part quelque temps à Lanvallay quand j’étais toute petite. Dinan est une petite ville où tout le monde se connait. C’est chaleureux. Mon quartier est calme. J’ai grandi à la Cité L’Écuyer. J’ai une grande sœur et deux frères. J’ai fait ma primaire à Dinan, puis mon collège et mon lycée. Je suis partie à la Fac à Rennes il y a trois ans. Je suis en licence de psychologie. Cela me plaît. Au départ, j’aimais beaucoup les séries télévisées sur tout ce qui concerne l’esprit criminel. Je voulais devenir profiler, mais en France, ce métier n’est pas reconnu. J’ai découvert d’autres professions dans le domaine judiciaire et je me suis intéressée au métier de psychologue dans les prisons. C’est ce qui me passionne le plus pour l’instant. Mais je ne peux pas y arriver tout de suite parce qu’il faut de l’expérience. Je pense commencer par travailler avec la protection de l’enfance, ce sera une passerelle pour aller vers la détention. Cela prendra du temps.
Mon premier souvenir sportif, c’est lorsque j’ai essayé la danse classique, petite. Je me souviens de mon premier justaucorps tout rose avec un tutu. Mais je n’ai pas du tout aimé. C’était trop lent. Pendant les spectacles, je n’arrivais pas à me tenir. Il me fallait quelque chose de plus casse-cou !
Quelle est votre pratique sportive ?
Le patin rythme ma vie depuis mes 7 ans. Je me souviens encore quand j’ai découvert ce sport. J’étais aux portes ouvertes sportives à Dinan. J’ai vu une tenue toute brillante, avec plein de paillettes et des patins avec des strass. Je me suis dit : « Ça va être mon sport ! » Je ne connaissais pas du tout le patinage artistique sur roulettes. J’ai dit à ma mère : « Il faut m’inscrire ! » Je n’ai pas mis de belle tenue brillante, au début, plutôt un casque. J’ai appris à tenir sur les patins, à me diriger, à rouler. Puis à faire des croisés, patiner en arrière, tenir sur un pied. Petite, j’ai très vite évolué. Le corps est plus souple. J’ai été repérée. Les entraînements se sont intensifiés d’un cours à cinq par semaine, après l’école et le dimanche matin. Comme j’habitais à côté de la salle, j’étais tout le temps disponible. Je me suis entraînée à réaliser des sauts, des pirouettes, des arabesques.
« J’ai vu une tenue toute brillante, avec plein de paillettes et des patins avec des strass. Je me suis dit : “Ça va être mon sport !” »
Ma mère s’est investie dans le club. Elle m’accompagnait aux compétitions. C’était compliqué pour mes frères et sœurs, qui se sentaient délaissés. Il n’y avait que le patin, le patin, le patin. Pourtant ma grande sœur faisait de la gym à un bon niveau aussi, mais comme elle était plus grande, ma mère la laissait partir avec son club. Le patin est aussi un sport qui coûte très cher, avec la licence, les tenues, les roues, les patins que l’on change en fonction du niveau… Ma mère m’a toujours acheté ce dont j’avais besoin. Je faisais du solo et du groupe. J’ai été championne de Bretagne. J’ai participé aux championnats de France, petite. J’étais dans les 10 premières. En groupe, on a fini troisièmes aux internationaux, l’année dernière. Une belle surprise.
J’ai eu deux grosses blessures récentes. À un entraînement juste avant les qualifications pour un championnat de France, je me suis fracturé le coccyx. Et lors de mon dernier entraînement, je me suis fissuré le ménisque. Le temps de guérir, j’ai décidé d’arrêter, récemment.
Que représente le sport pour vous ?
J’ai remarqué que lorsque j’étais triste, ou ennuyée, savoir que j’allais au patin me motivait. Je retrouvais mes copines. Souvent, les amitiés au sport sont les meilleures, parce que l’on vit les mêmes choses. J’aime le côté artistique. Avec des patins aux pieds, je me sens bien. C’est le fait de tourner, de sauter… Même les chutes font partie du jeu. Soit tu tombes, soit tu y arrives. Le sport, c’est surtout mental. Il faut réussir à dépasser son stress. Mais ça se gère. Il faut juste travailler. J’ai eu trois entraîneurs dans ma vie. Souvent pendant les compétitions, on n’a plus confiance, on pense qu’on ne va jamais réussir. C’est le moment où l’entraîneur doit tout donner pour te motiver. J’ai un rapport très compétitif au sport. Même quand je joue à un jeu de société, je ne m’arrête pas tant que je n’ai pas gagné. La phrase que je déteste est : « l’essentiel est de participer ». Non, ce n’est pas possible ! J’adore la compétition, surtout en groupe. Il y a une dynamique. On patine tous ensemble et il n’y a qu’un seul bruit, quand tout le monde est coordonné, c’est magnifique. Mais je n’ai jamais eu en tête d’en faire mon métier parce que ce n’est pas un sport très reconnu. On ne peut pas vivre de sauts et de pirouettes.
« On patine tous ensemble et il n’y a qu’un seul bruit, quand tout le monde est coordonné, c’est magnifique »
À l’avenir, quelles évolutions liées au sport aimeriez-vous voir se développer ?
La Beaumanoir, à Dinan, c’est mon club depuis que je suis toute petite. Je ne changerai jamais. On m’a proposé d’aller dans le club de Rennes, mais c’était impossible. Alors au début de mes études, je partais à Dinan le lundi, jeudi et vendredi, avec notre entraîneuse Pauline qui vivait à Rennes. Je rentrais tard chez moi, vers 22 h et je faisais mes devoirs jusqu’à minuit. Je n’y arrivais pas. Alors j’ai arrêté et je me suis consacrée à l’entraînement des enfants, toujours à Dinan. J’ai pu leur faire passer leur roue artistique pour aller en compétition régionale. Cette année, j’ai aussi arrêté d’entraîner parce qu’avec la licence 3, c’est compliqué. Comme je ne vais pas vivre du patin, j’ai décidé de lâcher. D’un côté, je suis triste parce que ça a toujours rythmé ma vie. Mais c’est aussi un soulagement. Je suis plus tranquille. J’ai mes soirées. Je me concentre sur l’école, mais s’ils ont besoin au club, je suis là. Beaucoup de choses ont été mises en place dans les quartiers prioritaires pour rendre le patin accessible, avec une licence à 10 euros et des systèmes de location de patins. Je vais souvent voir les petits que j’ai entraînés… On a une génération de champions qui arrive. Il ne faut pas lâcher. Je souhaite à mon club de réussir, d’être le mieux classé en Bretagne et en France.
Propos recueillis par Marie Fidel