Le constat initial : une forte dégradation de la qualité résidentielle liée à des occupations illicites importantes
En 2020, un diagnostic partagé (ville, bailleur) aidé de l’USH et d’un prestataire (la condition urbaine) est réalisé. Il s’attache à décrire le hall du 8 Bourbonnais sur la dalle du quartier Villejean comme l’épicentre d’actes délictueux avec notamment l’installation récurrente depuis 6 ans d’un trafic de stupéfiant qui se confond avec des présences et occupations oisives et de sociabilité qui s’étendent par porosité sur la dalle. Le bailleur explique cette présence par la géographie du lieu, à la fois proche des flux, dans une enclave protectrice en retrait des espaces animés de la dalle, qui semble « idéale » pour l’installation de ces activités de trafic.
Cette situation occasionne une gêne importante pour les habitants, et est doublée de problématiques de sécurité qui touchent également les agents du bailleur. Ces tensions s’inscrivent voire participent à un contexte plus globalement préoccupant avec une plus forte vacance commerciale et résidentielle liées à un fort déficit d’attractivité (plus forte de demande de mutation et fort taux de rotation, difficulté d’attribution). Le tout dans un contexte de fragilisation des locataires (vieillissement, plus fort taux de pauvreté et d’absence d’activité que dans les autres QPV rennais)
Pour trouver des solutions à ces problématiques et améliorer la tranquillité dans ces halls, Espacil Habitat a souhaité engager une démarche partenariale afin d’agir de façon globale et coordonnée.
Construction d’une stratégie globale à moyen terme par la mobilisation de partenaires : assurer et pérenniser une intervention de qualité
Afin de répondre à ces enjeux soulevés et dépassant le cadre des activités et de l’intervention du bailleur, une démarche multipartenariale de diagnostic, réflexion puis d’action a été mise en œuvre et coordonnée par un comité de pilotage réunissant Espacil Habitat, la Ville et Métropole de Rennes, la Préfecture, le Parquet et la Police Nationale. Ces travaux se sont organisés autour de quatre thématiques où ont été également associés ponctuellement syndics de copropriétés, collectifs d’habitat ou acteurs associatifs :
- L’axe sécurité publique et résidentielle qui vise à renforcer les compétences internes du bailleur en la matière, de fluidifier le partage de connaissances avec la police-justice et de les associer en amont lors d’interventions sur le bâti par exemple. Exemples d’actions :
- Création d’un guide pour les personnels (sécurité et intervention)
- Formation d’agents et projet d’assermentation des agents en questionnement. Cette démarche a été testée dans le Morbihan par le bailleur mais récolte peu de retours positifs. En effet, Espacil Habitat craint de mettre ses agents en difficulté avec ce statut particulier vis-à-vis des habitants ;
- Outil partagé d’alerte et de demande d’intervention, articulation avec le GPO. Concrètement une adresse mail d’alerte commune aux différents acteurs présents sur la dalle (prévention, élus, bailleurs, copropriétés, Police Nationale et Municipale, …) permet de faire circuler rapidement les informations. Cet outil d’alerte permet à chacun des acteurs de réagir voire d’anticiper des situations.
- Appel ponctuel à des entreprises de gardiennage lorsqu’il y a un retour important de squats. Ce recours permet de répondre –à minima- au besoin de réassurance des locataires
- Des interventions patrimoniales pour limiter les détournements d’usage et proposer de nouvelles qualités.
- Réaménagement des abords avec moins de place pour la voiture (casser l’effet drive) et des espaces libérés réorientés vers des usages partagés à destination des habitants (jardins partagés, terrasses partagées, etc.) ;
- Réaménagement des halls afin d’en restreindre l’espace et limiter les possibilités de station
- Repenser l’équilibre de peuplement en retravaillant l’offre et la mise en location.
- Réorientation progressive de l’offre de Location active,
- Développement d’une offre de logements bleus (label de logement adaptés aux séniors) répondant à la dynamique de vieillissement mesurée à l’échelle du quartier et création de « colocs jeunes »
- L’animation de proximité doit être le support d’une réappropriation et d’une réactivation positive et qualitative des alentours. Elle est pensée en deux niveaux :
- Renforcement du programme d’animation et de médiation en lien avec les associations du quartier et à proximité de ces halls. La multiplication des actions d’animation (notamment l’été) permet au bailleur d’occuper et de marquer l’espace, limitant ainsi les occupations abusives.
- Occuper les locaux en rez-de-chaussée par des activités temporaires (le temps des travaux d’aménagement afin de montrer l’amorce du projet) puis plus pérennes (création d’un pôle santé, un pôle petite enfance et d’une salle pour les séniors)
Bilan : émergence d’une synergie inter-acteurs, poursuite dans la durée de la démarche
Une synergie inter-acteurs aboutissant à une inscription des démarches dans le cadre de l’ANRU. Le partage des diagnostics des différents acteurs et leurs réflexions collectives ont permis d’amorcer une vraie dynamique de projet poussée par une vraie énergie et ambitions des parties prenantes.
En 2023, la signature d’un avenant au NPNRU sur Rennes Métropole en intégrant le quartier de Villejean reconnait les réflexions et le travail amorcé par les acteurs du quartier. Cette inscription permet de nourrir et d’accélérer les ambitions initiales comme les interventions sur les rez-de-chaussée (aménagement de locaux), la réorganisation des espaces publics (cheminements piétons, place de la voiture, etc.) ou le peuplement des tours (restructuration complète d’une tour avec création de logements T2/3 modulables en T5. Dans ce cadre nouveau, les quatre axes de réflexion continuent aujourd’hui à avancer.