Cécile, comédienne amatrice au sein de la Houlala compagnie, militante du vivre ensemble dans le quartier de La Rocade.
Nom : LOISEAU
Prénom : Cécile
Age : 36 ans
Quartier : La Rocade, Sablé-sur-Sarthe
Signes distinctifs : Dans le quartier, on l’appelle par son nom de scène : « Nadine et sa valise ».
Engagements : Hérités de ses souvenirs d’enfance dans le quartier : la réouverture des maisons de quartier, la place donnée aux jeunes et le partage entre générations sont ses principaux chevaux de bataille.
Cécile Loiseau est née et a toujours vécu à Sablé sur Sarthe. En 2016, elle participe pour la première fois à la déambulation « Les Tambours de Montreux », puis au spectacle « Tous de loin, tous du coin » de la Houlala compagnie, une compagnie de théâtre et d’arts de rue basée à Sablé sur Sarthe, dont les processus de création impliquent les habitant-e-s. Une révélation pour cette « mère au foyer par choix », convaincue de l’utilité sociale de ce projet au cœur du quartier.
« J’ai envie de dire aux gens que ce sont les cités qui font vivre la ville, et que si on continue à les oublier, elles vont s’éteindre. »
Pouvez-vous vous présenter ainsi que votre quartier ?
« Je suis Madame Cécile Loiseau, mère au foyer, maman de 4 enfants, dont deux porteurs de handicap. J’ai toujours vécu à Sablé et j’ai vécu six ans dans ce quartier de La Rocade. Je le connais très bien, c’est un quartier qui était vivant. Dans ce quartier, il y a toutes les religions et tous les pays. Et on apprend la vie des autres, les cultures, les coutumes, grâce à l’association Alpha Sablé qui participe aussi aux spectacles de la Houlala compagnie. Quand on était gosses, peu importe le quartier où on vivait, on avait ces fameuses maisons de quartier qui existaient. On faisait des inter-quartiers, donc on se rencontrait et on n’avait pas de problème avec ces questions de savoir de quel quartier on venait. Malheureusement ces maisons de quartier ont fermé et ça a été comme mettre un mur entre les cité HLM et la ville. »
Quel a été le déclic qui vous a donné envie de vous engager dans votre quartier ?
« Au départ, ma fille a voulu participer à un spectacle « Trions nos déchets » avec la Houlala compagnie pour inciter les gens de la cité à trier les déchets. C’est très important. C’est un respect de la planète, celle que l’on va laisser à nos enfants. On est partis sur de la percussion sur poubelles. On s’est vraiment éclatés dans les rues, on a dansé avec les containers, et ça a été un plaisir. Et mes grands ont voulu continuer avec le spectacle « Tous de loin, tous du coin ». Il leur fallait un responsable légal, alors on est allés aux premières répétitions. Au début, je regardais, je ne voulais pas participer du tout, et j’ai commencé à vraiment apprécier ce qu’ils faisaient. J’ai vu mon aînée, qui est très réservée, s’ouvrir aux gens, et j’ai voulu l’accompagner. Quand Nicolas [Nicolas David, metteur en scène] nous a présenté « Tous de loin, tous du coin » et qu’on a su que c’était à La Rocade, ça donnait encore plus envie de le faire, parce que La Rocade a une mauvaise image à Sablé. Avec ce spectacle, ce que j’adorais c’est que le midi on mangeait tous ensemble et on partageait les repas. Ce n’était pas chacun amène son pique-nique et se met dans son coin. Non, on partageait. Maintenant on se croise dans la rue, on se dit bonjour et on s’appelle par nos prénoms de scène. Ce que j’ai beaucoup apprécié, c’est de voir ces enfants de plusieurs communautés, mélangés. La veille, ils pouvaient se disputer, et le lendemain, au théâtre, tout était effacé, il y avait même de l’aide. Même à l’école, on a vu un changement chez eux, dans la cours de récréation. Il n’y avait plus de clan. Les enfants se sont vraiment mélangés aux adultes. Les enfants nous ont écoutés. Il y avait du respect. Quand ça s’est terminé en 2019, on a eu de la tristesse parce qu’on avait vraiment fait un petit groupe d’entente. »
« On apprend à s’exprimer, on a le droit de dire qu’on n’est pas content, sans blesser la personne, et le théâtre aide beaucoup. »
Pensez-vous qu’être une femme change la donne quand on s’engage sur un territoire ? Votre parole est-elle plus difficile à faire entendre ?
« Être une femme c’est aussi dire quand on n’est pas contentes, et se faire entendre sur les voix masculines. Quand on s’est tous retrouvés au théâtre, il n’y avait plus la femme d’un côté et l’homme de l’autre, et quand on parlait en tant que femmes, on était autant écoutées que les hommes. Qu’on habite en cité ou en centre-ville, on a le droit de se mettre en robe, en jupe et de sortir. J’ai envie de dire aux jeunes fille « sors comme tu es, ne te cache pas ». Être une femme c’est participer à la société. On n’est pas juste là pour porter les enfants ou faire le ménage. On existe, nos grands-mères se sont battues pour l’égalité, à nous de continuer. »
Avez-vous un rêve pour votre quartier et ses habitant-e-s ?
« Notre souhait c’est de faire reprendre le carnaval et de faire rouvrir les maisons de quartier. Les personnes âgées et les retraités venaient et on faisait des activités ensemble, il y avait des échanges entre les générations. Dans 5 ans, j’aimerais voir un quartier vivant et non un quartier endormi. Voir les gens sortir des tables au milieu des HLM et partager des repas, se dire bonjour, s’ouvrir aux autres. Moi je serai la première à préparer quelque chose et à y aller. »
Propos recueillis par Claire Gadebois