Partie 4. Réactivation et réappropriation des rez-de-chaussée

Introduction. Des approches sécuritaires ne sont pas une fin en soi : pour des rez-de-ville de qualité et vivants

Les aménagements sécuritaires mis en œuvre dans des espaces plus difficiles ne sont pas des solutions pérennes (détournements, reports…) au regard d’expériences rencontrées. Pourtant, comme le montre Amandine Mille (2021), sans pour autant systématiquement s’y référer, les bailleurs pensent le réaménagement des espaces de telle sorte qu’ils ne soient pas source de difficulté de gestion, de détournements d’usages source de nuisances pour les habitants. Si ce prisme de réflexion est parfaitement logique du point de vue de la gestion pure, il est aussi vecteur d’appauvrissement d’éléments importants (fonctions, praticité, confort, esthétique…) dans la qualité d’usage, dans la qualité paysagère d’un site. Si l’approche sécuritaire et/ou gestionnaire pure offrent une réponse à des situations difficiles, elles ne devraient donc pas être le seul prisme de réflexion des espaces résidentiel et des rez-de-chaussée.

« La déléguée générale adjointe du Forum français pour la sécurité urbaine (FFSU) estime que ″la gestion et l’animation de l’espace public avec des associations locales et la réappropriation du quartier par les habitants″ réduisent le sentiment d’insécurité. »[1]

La qualité d’usage d’un espace résidentiel et sa pérennisation passent également par une réflexion complémentaire s’inscrivant dans des projets plus globaux de renforcement des fonctions résidentielles, d’animation, d’utilisation et d’appropriation de ces rez-de-ville. En effet, par le renforcement de ces qualités (esthétique, fonctionnelle et d’usage), les espaces sont fréquentés, appréciés, et deviennent le support d’usages et de pratiques habitantes. Ainsi, « le traitement physique des quartiers a également pour objectif à moyen et long terme de réinjecter du lien social et de la convivialité qui pourront, tout autant que les aménagements sécuritaires intrinsèques, concourir à la diminution de l’insécurité et peut-être plus encore à celle du sentiment d’insécurité »[2] Par exemple, ces lieux alors (ré)appropriés offrent moins de places vides et deviennent moins susceptibles de subir des occupations abusives voire des incivilités importantes.

En effet, il est plus simple d’accaparer des espaces vides de toutes pratiques que des espaces aux cœurs de habitudes des voisins. Par ailleurs, des lieux occupés et utilisés par les habitants entre autres créent du croisement (où peuvent se nouer et se renforcer des relations de voisinage facilitant des réactions d’opposition ou de remontées d’informations en cas de troubles) et des flux et des présences qui peuvent être rassurantes pour des publics moins à l‘aise dans leurs mobilités dans les espaces collectifs. Ainsi, un rez-de-ville plus pratique selon ses habitants a plus de chance de devenir plus vivant et participe indirectement à la diminution de phénomènes négatifs (incivilités, sentiment d’insécurité) par un retour d’une forme de contrôle social.

Ces solutions de réactivation et d’animation sont aussi nombreuses et variées que les contextes de chacun des quartiers et des résidences. Elles peuvent être pérennes ou temporaires, concerner un public large ou plus spécialisé, etc. Dans les fiches expérience qui suivent, nous proposons quelques-uns de ces exemples qui nous semblent éclairant au regard des enjeux auxquels ils permettent de répondre.

S’agissant des solutions pérennes, nous pouvons noter une crainte liée à ces types d’investissements empreints d’incertitude quant à son bon fonctionnement, son utilisation et son appropriation par des publics. Afin de maximiser leur réussite et pour être sûr de réussir à attirer les habitants avec des fonctions ou services, il est important de s’appuyer sur les besoins, les demandes, associer les habitants. Dans cette approche, les méthodes de l’urbanisme tactique offrent des solutions par des phases de test via la mise en place (temporaire) de structures ou de services pour repenser et expérimenter l’usage et la perception des espaces. Sur ce modèle, l’adaptation, l’agilité de ces projets de réinvestissement des espaces de rez-de-chaussée et/ou résidentiels semblent être un vecteur important de réussite dans le temps.

Exemples et ressources pour l’installation de fonctions et activités pérennes :

  • Quelles fonctions dans les espaces collectifs résidentiels pour enrichir les services aux habitants et répondre à leurs besoins : un outil de (re)vitalisation et d’appropriation des parties communes
  • Permettre une appropriation de son espace résidentiel par la qualité esthétique
    • Travailler l’identité résidentielle singulière de chacun des halls
      • Fresques, aménagements, plantations participatifs
      • Eléments distinctifs de qualité (architecturaux, paysagers)
    • Travailler la qualité des espaces résidentiels
      • En Seine-Saint-Denis, des œuvres d’art dans le hall des HLM : «D’habitude, c’est plutôt à Paris» Le Parisien du 02/06/2021. Découvrir
      • Seqens signataire de la charte « 1 immeuble 1 œuvre » en faveur de la promotion de l’art sur les territoires. Découvrir

 

Ainsi, dans cette partie, les expériences s’inscrivent dans cette approche de qualité résidentielle. Les trois premières expériences présentées s’attachent à exploiter le potentiel des espaces communs de façon pérenne pour y développer ou y améliorer des fonctions résidentielles ou économiques. En parallèle des réactivations pérennes par ces équipements/fonctions, l’animation temporaire est également vectrice d’activités, de présence, support d’appropriation, de souvenirs positifs, de liens entre habitants/voisins. En conséquence, la dernière fiche expérience propose une forme de recensement non-exhaustif de type d’animation qui permettent d’occuper temporairement et positivement les espaces publics ou résidentiels en répondant à des besoins des populations habitantes.

 

Fiche expérience. Animation de locaux pour les habitants et associations en rez-de-chaussée par l’APRAS à Rennes

A Rennes, la gestion et l’animation des locaux des Locaux Collectifs Résidentiels (LCR) en rez-de-chaussée sont confiés par les bailleurs à l’APRAS. Fort de cette spécialisation, leur expérience montre que ces locaux peuvent être un support important de la qualité de vie des QPV rennais (services, fonctions, animation, flux et présences dans l’espace public…)

 

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Fiche expérience. Des locaux vélos de qualité pour enrichir les fonctions résidentielles. Paris Habitat

Dans de nombreux contexte,  les locaux vélos peuvent être la source de détournements d’usages parce qu’ils sont souvent peu pratiques donc sous-utilisés. Face à cette difficulté, plutôt que de supprimer cette fonction, Paris Habitat a fait le pari de réhabilitation de qualité de ces locaux.

 

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Fiche expérience. La création d’espaces communs au cœur de la réhabilitation des tours Guérande et Groix par Archipel Habitat à Rennes

Profitant de l’opération de réhabilitation de deux tours, Archipel habitat a expérimenter la création d’espaces communs mobilisables par les résidents (buanderie, salles, toit terrasse). Dans ce projet la véritable expérimentation commence à la livraison de ces espaces : premier retour d’expérience.

 

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Fiche expériences. Dispositifs d’animation temporaire pour se réapproprier les rez-de-chaussée

Il existe une multitude d’expériences d’animation temporaire aux abords des immeubles voire dans les halls. Avec des finalités et des contextes différents, nous en avons recensé une dizaine qui participent directement de la qualité de vie dans ces espaces résidentiels.

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[1] Diane Valranges dans Actualité Habitat n°1146 (mai 2021)

[2] Billard, G., Chevalier, J., & Madoré, F. (2005). Chapitre 9. ″Prévenir l’insécurité ou les nouvelles ambitions des politiques urbaines : la résidentialisation en question…″ In Ville fermée, ville surveillée. Presses universitaires de Rennes. https://doi.org/10.4000/books.pur.1883.

 


 

Continuez la lecture du dossier : Partie 5. Le mode projet global et multipartenarial pour faire émerger des nouvelles solutions et amorcer une dynamique positive

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