Portraits de femmes. Nadia HARRARY, au service des habitant·e·s du quartier Jean Monnet à Cholet

Nadia , engagée au service des habitant·e·s de Jean Monnet

Nom : Harrary

Prénom : Nadia

Âge : 47 ans

Quartier : Jean Monnet, Cholet

Signes distinctifs : Dans le quartier, on l’appelle Madame Nadia.

Engagements : Agente de médiation « Accès aux droits et à la santé », elle est très impliquée au sein du Conseil Citoyen, et dans le Centre socio-culturel K’léidoscope. Elle est également membre du Conseil d’Administration de la Régie de Quartier.

 

Originaire du Maroc, Nadia passe 16 années en Espagne avant de s’installer en France en 2013. Elle rejoint des membres de sa famille à Cholet. Son premier réflexe : inscrire son fils au Centre socio-culturel du quartier et participer à ses activités. De cette première rencontre découleront ses engagements professionnels et bénévoles, au service de ses habitant-e-s et d’une valeur forte : la citoyenneté.

 

« Quand tu viens ici en tant qu’étranger et que tu trouves des gens qui t’aident, qui t’écoutent, et te mettent sur la bonne voie, ça donne des choses positives. »

 

 

Pouvez-vous vous présenter ainsi que votre quartier ?

« Je suis d’origine marocaine, de nationalité espagnole et je vis en France. J’ai commencé mon parcours professionnel au Maroc, j’ai une licence de sociologie. Je me suis mariée en Espagne et j’ai eu un enfant. Je suis quelqu’un qui aime bouger, sortir, rencontrer des gens. Au Maroc, j’étais quelqu’un qui participait dans les Centres sociaux, j’ai ça dans le sang. Je suis venue en France en 2013. J’ai commencé à travailler, je suis allée à l’AFODIL pour mieux maitriser la langue française. J’ai rencontré de super personnes là-bas. J’ai travaillé à la Régie de quartier. Comme c’est une association d’insertion professionnelle, ils ont vu que j’avais une licence de sociologie. La Conseillère qui est devenue Directrice de la régie de quartier, m’a parlé du métier d’Agent de médiation. J’ai dit non, je pensais que je ne pouvais pas faire ça, qu’il fallait maitriser la langue. Elle a bien insisté et elle a réussi à me convaincre. J’ai obtenu le titre professionnel d’Agent de médiation. Mon travail consiste à aider les gens dans leurs démarches administratives et notre but est d’écouter et d’orienter. Je ne suis pas née dans le quartier Jean Monnet mais j’ai vu la différence sur les photos et dans les paroles des gens, entre le quartier d’avant, et maintenant. Il s’est transformé, il y avait des grandes tours, d’anciens immeubles, et il y a eu une grande rénovation urbaine. Il y a beaucoup plus d’espace. Et c’est un quartier qui a un mélange culturel énorme, incroyable. »

 

Quel a été le déclic qui vous a donné envie de vous engager dans votre quartier ?

« Deux mois avant que je commence mon travail au CCAS, j’étais en arrêt maladie à cause de mon genou, et j’avais besoin de sortir. Un jour on m’a proposé de venir voir le Conseil Citoyen. Ça m’a plu de rencontrer des gens que je ne connaissais pas. J’ai commencé les réunions avec eux, et ça a été ma première relation avec les habitants du quartier.

Aujourd’hui et dans le cadre de mon travail, je suis présente une fois par jour dans les 4 quartiers, pour écouter, aider et orienter les habitants vers les organismes compétents.

Avec le Conseil Citoyen, on a mis en place des permanences sur le marché chaque deuxième jeudi du mois pour aller vers les gens, parler avec eux. L’idée est de mettre un stand pour que les gens viennent vers nous pour les informer sur l’existence et le rôle du Conseil Citoyen. Il y a d’autres femmes qui y participent, qui ont une grande motivation, qui ont des enfants et qui font un sacrifice pour venir passer deux ou trois heures en réunion, participer à des activités. Je voudrais les citer : Alice Fakambi, Francine Delerm, et Malikat Hachim. On a dû arrêter pendant le confinement mais on va reprendre. »

 

 

Pensez-vous qu’être une femme change la donne quand on s’engage sur un territoire ? Votre parole est-elle plus difficile à faire entendre ?

 

« Franchement oui. Moi j’ai grandi au Maroc, avec une grande liberté, dans ma vie à la maison, avec mes parents. Il n’y avait pas cette idée qu’une femme ne peut pas faire certaines choses. Malheureusement dans le quartier, j’ai senti ça dans plusieurs situations. Avec les jeunes filles par exemple, leur participation au Centre est un peu limitée. Quand on a fait le projet culturel sur les femmes et les vêtements, avec le Conseil Citoyen, on voulait que des jeunes filles participent avec nous, mais c’était difficile de les convaincre, de les faire venir au Centre. Après ce sont peut-être les jeunes en général, qui préfèrent peut-être faire d’autres choses. Il y a des gens qui pensent qu’une femme n’est pas à sa place avec des hommes. Certes ça me gêne mais je respecte les opinions. Comme c’est un quartier qui a de la diversité culturelle, il faut respecter cette diversité et l’utiliser comme un point fort et non comme un moyen de conflit ou de rejeter l’autre. On ne peut pas changer les gens mais on doit les inciter à apprendre, à respecter ce que pensent les autres. »

 

« On apprend la citoyenneté en vivant avec les gens. »

 

Nous avons vécu deux mois de confinement, quelles ont été les difficultés vécues par les familles dans le quartier Jean Monnet ?

« Par-rapport à mon travail, il y a des gens qui m’ont appelée pour des soucis concernant la feuille d’autorisation de sortie, pour imprimer des documents. Avec la Collectivité et les médiateurs, on a mis des autorisations de sortie dans toutes les boîtes aux lettres des différents quartiers, immeuble par immeuble, avec une notification d’informations et un numéro de téléphone en cas d’urgence. Ici la Mairie, selon mon opinion, a bien géré. Il y avait aussi des permanences pour l’écoute, la distribution alimentaire…  Au niveau personnel, c’était difficile pour les gens, pour les enfants. Au départ, on l’a pris à la rigolade, on s’est dit : « on va se reposer à la maison », et après, quand ils ont prolongé le confinement, c’était dur. Le quartier était calme, les gens ont montré un grand respect. On a aussi appris à faire du télétravail, à aider les gens à distance sur les démarches administratives. Maintenant je sais faire, et c’était bien d’apprendre à faire ça. »

 

 

Avez-vous un rêve pour votre quartier et ses habitant-e-s ?

« J’aimerais que les jeunes, filles et jeunes garçons, participent dans les activités du Centre. Dès toute petite, j’ai commencé à participer aux activités d’un Centre au Maroc, à faire du théâtre. Ce sont des choses qui font grandir et qui éduquent. Et j’aimerais que les parents soient conscients de ça. Le Centre n’est pas un lieu où ils vont apprendre de mauvaises choses. C’est un lieu où ils vont s’exprimer sur ce qu’ils veulent. Ç’est ça qui va changer beaucoup de choses, surtout sur la mentalité des jeunes, sur le respect de l’autre. On ne l’apprend pas seulement à l’école ou dans les livres. Ici, au Centre, on le vit. On parle beaucoup du vivre ensemble, mais c’est ici, au Centre culturel, qu’on peut enseigner aux jeunes la citoyenneté et le de vivre ensemble. Les animateurs ici font vraiment le nécessaire pour arriver à ça mais c’est un long travail. »

Propos recueillis par Claire Gadebois

 

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