Contexte
L’ensemble du territoire de Saint-Jacques-de-la-Lande (10 175 habitants) fait partie du Contrat Urbain de Cohésion Sociale de Rennes Métropole.
Le dispositif de réussite éducative de Saint Jacques de la Lande existe depuis 2005. La coordinatrice du dispositif a une formation de psychologue (Enfance et Adolescence)
Le PRE de Saint Jacques de la Lande développe :
– Des actions menées en propre : ateliers lecture, atelier FLE/FLS, actions santé
– Des actions menées en partenariat avec le Centre Social ou avec l’AFEV
– Des actions articulées avec le CUCS (ex : dépistage dentaire CE1)
Synthèse
Cette expérience met en exergue l’impact du Conseil Consultatif du PRE de Saint Jacques de la Lande dans le cadre du renforcement et l’adaptation de l’intervention de l’Education nationale.
Les acteurs de droit commun concernés :
– L’inspecteur d’académie adjoint de l’Ille et Vilaine
– L’inspecteur de secteur
– Un collège de secteur
– La médecine scolaire de l’éducation nationale
Les effets produits :
– le renforcement des moyens pour le FLE/FLS : + 2h d’enseignement supplémentaire
– le renforcement des moyens pour la médecine scolaire : + 1/2 poste d’infirmière de l’éducation nationale
1/ La mise en lumière de besoins de soins en santé scolaire insatisfaits par le PRE : dotation d’un ½ ETP d’infirmière scolaire supplémentaire sur le territoire
Genèse de la démarche
La santé est l’axe d’intervention prioritaire défini par l’ACSE pour l’année 2012 pour les programmes de réussite éducative. La question de l’accès aux soins fait bien sûr partie des points travaillés avec les parents dans la mise en place des parcours personnalisés. Cela consiste par exemple à les accompagner pour la programmation d’un bilan orthophonique, à accompagner physiquement un enfant pour les différentes séances d’un bilan psychologique au CMP, etc… Mais, à côté de cet accompagnement, le PRE de St Jacques met en œuvre d’autres actions en matière de santé.
Par exemple, et afin de pouvoir cibler les vrais besoins des enfants jacquolandins en matière de santé, le PRE a accueilli de février à juin 2012, une stagiaire terminant son Master de Psychologie Communautaire de la Santé. L’objectif du stage était de faire un diagnostic de santé local concernant les enfants d’âge primaire.
Afin de pouvoir mettre en place des actions qui viseraient à favoriser la bonne santé des enfants, il est nécessaire de faire au préalable un état des lieux à l’échelle locale. Le diagnostic local de santé est une démarche d’analyse de situation partagée, utilisant à la fois des approches quantitatives et qualitatives, et envisageant des pistes d’actions destinées à améliorer la situation de santé de la population.
Un tel diagnostic répond à plusieurs objectifs :
- identifier les problèmes, les besoins et les ressources d’une population et avoir ainsi accès à une meilleure connaissance des situations locales pour une adaptation optimale des actions et des ressources ;
- avoir une meilleure connaissance de la situation de santé réelle mais aussi de la situation « vécue » et croiser les données afin d’arriver à des priorités communes entre les habitants, les professionnels de l’école et de la santé, les élus ;
- faciliter la mise en œuvre d’actions cohérentes entre tous les acteurs, aider à la prise de décision et à l’argumentation des demandes budgétaires auprès des financeurs.
Afin de croiser les regards des différents acteurs sur la thématique de la santé, trois types de recueils d’informations ont été utilisés : l’un auprès des professionnels du scolaire, du social et du médical, un autre auprès des parents et un dernier, auprès des enfants.
Les principales préconisations du diagnostic
– pérenniser le dépistage dentaire systématique pour les CE1 (voir plus bas),
– mettre en place des actions au sein de l’école, dans la continuité de ce dépistage,
– proposer une action à destination des enfants dont l’objectif général serait d’améliorer la qualité de vie de l’enfant en le responsabilisant et en le rendant autonome dans la gestion de son propre sommeil (cf. manque de sommeil identifié par de nombreux professionnels chez les enfants),
– informer les parents sur le bien-être psychologique de leurs enfants (domaine jugé prioritaire par les parents et celui sur lequel ils souhaitent avoir des informations),
– instaurer une permanence d’une structure de santé mentale pour les enfants sur la commune,
– mettre à leur disposition un guide répertoriant tous les professionnels de santé de la commune.
Afin d’améliorer le travail sur l’axe santé, il a paru opportun d’articuler PRE et volet santé du CUCS. Une demande de subvention a donc été faite dans ce cadre afin de mener un dépistage dentaire systématique chez les enfants scolarisés en CE1.
Ce dépistage avait été validé par le Conseil Consultatif du 14/09/2010 pour l’année 2010-11, mais sa mise en œuvre avait été reportée à 2012. On peut préciser que le même type d’actions a déjà été mené par d’autres PRE en France. La santé bucco-dentaire des enfants est l’un des axes majeurs de la Loi de santé publique du 9 août 2004, qui a fixé l’objectif suivant : réduire de 30 % en cinq ans l’indice carieux des enfants de 6 et 12 ans.
L’Union Française pour la Santé Bucco-Dentaire (UFSBD) propose un plan de prévention bucco-dentaire, dont notamment une intervention en classe de CP sur l’hygiène bucco-dentaire. Le dispositif M’T’Dents de la Caisse Primaire d’Assurance Maladie propose des examens dentaires pris en charge à 100% aux 6 ans, 9 ans et 12 ans de l’enfant. L’âge des enfants concernés par cette action n’a pas été choisi au hasard mais en fonction de ce dispositif de droit commun, le dépistage se situant entre les examens de 6 et 9 ans. Il se justifie d’autant plus que St Jacques de la Lande a été identifié comme un territoire prioritaire par la CPAM au vu du faible taux d’utilisation des formulaires M’T’Dents par les familles de la commune.
Ce dépistage s’inscrit dans un cadre de prévention en matière de santé et d’accès aux soins. Les maladies bucco-dentaires sont corrélées à des facteurs environnementaux et sociaux et peuvent être considérées comme un problème de santé publique, car elles atteignent principalement les populations défavorisées et socialement marginalisées.
Du point de vue de l’enfant, il faut aussi prendre en considération la douleur, les déficiences fonctionnelles et la détérioration de la qualité de vie que peuvent engendrer les maladies bucco-dentaires.
Les objectifs de ce dépistage systématique étaient multiples :
- avoir une idée précise de l’état de la dentition des enfants de CE1 ;
- développer la prise de conscience des familles de l’importance de la santé bucco-dentaire (y compris pour les dents de lait) ;
- faciliter l’accès aux soins par :
– l’identification des situations nécessitant des besoins de soins,
– l’incitation des enfants à consulter régulièrement un chirurgien-dentiste,
– la visite de dentistes à l’école pour baisser une éventuelle anxiété chez l’enfant lors des consultations extérieures,
– l’apprentissage des gestes d’un brossage efficace auprès des enfants.
La relation entre la santé bucco-dentaire et l’état de santé générale n’étant plus à démontrer, cette action a également comme objectif de repérer les enfants en carence de soins de façon plus globale.
L’action
L’action a donc été réalisée, auprès des enfants scolarisés en CE1 dans les trois écoles primaires de Saint-Jacques-de-la-Lande, avec des élèves chirurgiens-dentistes de 6ème année.
A chaque fois, l’intervention s’est déroulée en deux temps : une animation sur l’hygiène bucco-dentaire par petits groupes de 4 à 6 enfants et un examen individuel pour tous les enfants autorisés par leurs parents. Cet examen a donné lieu à l’établissement d’une fiche pour chacun indiquant l’état dentaire et le besoin de soins éventuel.
Un courrier a été envoyé à tous les parents pour leur indiquer le résultat de l’examen dentaire, avec une proposition d’accompagnement dans la démarche d’accès aux soins lorsque ceux-ci étaient nécessaires.
Au niveau des résultats :
– 96 enfants ont été examinés sur les 117 scolarisés en CE1 sur la commune, soit 82%.
– (11 refus parents, 4 non réponses et 6 enfants absents le jour de l’examen).
– 44 enfants ont été détectés comme ayant besoin de soins, soit 45%.
A titre de comparaison, une étude nationale réalisée par l’Union Française pour la Santé Bucco-Dentaire (UFSBD) en 2006 à la demande de la Direction Générale de la Santé avait mis en évidence un taux de 37% d’enfants âgés de 6 ans ayant une ou plusieurs caries.
Tous les parents ont été contactés par courrier et/ou par téléphone pour être tenus informés du besoin ou de l’absence de besoin de soins.
L’objectif de cette action n’était pas d’en rester à un simple fait de constatation mais bien d’offrir aux parents qui le souhaitaient un accompagnement vers le soin (ex : aide à la prise de rendez-vous chez un dentiste, intervention d’un interprète pour les familles non francophones). Tous les chirurgiens-dentistes de la commune avaient par ailleurs été informés de la tenue de cette action.
Au final, 5 familles ont souhaité un accompagnement pour l’accès aux soins (soit 11% des enfants examinés). Il est important de noter que ces 5 familles étaient déjà suivies dans le cadre du PRE. On peut donc penser qu’il est nécessaire qu’un lien de confiance soit déjà établi avec les parents pour qu’ils acceptent d’aborder cette question du besoin de soins chez leur enfant.
Au vu des résultats obtenus, la demande de subvention CUCS pour cette action a été renouvelée chaque année depuis.
Le diagnostic initial a mis en lumière le fait que infirmière scolaire de secteur n’avait plus le temps de faire les visites des CE2 et l’intervention du PRE a confirmé cette insuffisance de moyen.
Pour l’année scolaire 2013-14, l’Education nationale a fait le choix de doter le territoire d’un ½ ETP d’infirmière scolaire supplémentaire (visites de grande section de maternelle + visites CE2).
Les leviers
– L’appui du Chargé des politiques partenariales de l’Inspection d’Académie (accès direct au DASEN). Ainsi le Directeur Académique des Services de l’Education Nationale est intervenu pour faciliter l’articulation entre le PRE et la médecine scolaire, notamment en termes de secret médical.
– L’appui de l’infirmière scolaire de secteur qui a pu dire ses difficultés à couvrir le territoire de St Jacques.
Les freins
La difficulté pour le service technique de la médecine scolaire d’accepter l’intervention de la collectivité sur le champ de l’Education nationale.
2. Les ateliers FLE/FLS au collège de Saint Jacques de la Lande : d’une action du PRE à une reprise par le droit commun
L’action
Le PRE anime des ateliers FLE/FLS destinés aux élèves de la grande section de maternelle à la 3ème qui présentent des difficultés dans la maîtrise de la langue française. Ils sont d’abord repérés par les enseignants.
Après autorisation des parents, ils sont évalués par les professeurs de FLE / FLS afin de s’assurer que les difficultés constatées en classe ont bien cette origine. Les données du bilan permettent également de fixer des objectifs de travail différenciés pour chaque élève. En fin d’année ou dès que les objectifs sont atteints, un rendez-vous est fixé aux parents par la coordinatrice et la professeur de FLE pour présenter les évolutions de l’enfant et leur donner les moyens de pérenniser les acquis de l’enfant (ex : pratique du français pendant les vacances, lectures régulières).
Cette action vient bien en complémentarité des dispositifs existants de l’Education Nationale pour les élèves allophones. En effet, les UPE2A (ex Clin et lesCla/Cla-Nsa) ne peuvent pas, le plus souvent par faute de place, intégrer tous les enfants qui devraient en bénéficier (ex : arrivées en cours d’année). Ces élèves doivent alors rejoindre leur école ou collège de secteur. Il arrive aussi que des parents refusent la place qui a été attribuée à leur enfant en UPE2A (le plus souvent pour des questions de mobilité). Enfin, sont également inscrits aux ateliers de FLE/FLS des enfants nés en France et qui ne peuvent donc pas prétendre à une inscription dans ce type de classes.
En avril 2011, lors d’un conseil consultatif, les professeurs de FLE du PRE sont venues présenter ces ateliers. Il est vite apparu que la séance hebdomadaire d’une heure ne pouvait suffire à pallier les difficultés des collégiens. Ce point a été souligné par le principal du collège ainsi que par l’IA adjointe.
Pour la rentrée 2011, différentes améliorations ont été proposées :
– avancer le début de l’action au mois d’octobre et non plus novembre
– proposer des créneaux horaires mieux adaptés pour les enfants de primaire (limiter les créneaux de la pause méridienne),
– renforcer le partenariat avec le collège pour mieux répondre aux besoins des collégiens : dotation financière exceptionnelle de l’Inspection d’académie pour le collège pour 2h de FLE par semaine (confiées à une professeur du collège ayant déjà une décharge de 9h pour prendre en charge les enfants du voyage et possédant une qualification en FLE)
Les effets produits
Le rôle du PRE : avoir attiré l’attention de l’Inspection académique sur le public allophone accueilli au collège de St jacques (en augmentation par ailleurs).
A court et moyen terme : le renforcement du partenariat collège PRE :
– répartition des sphères travaillées avec les élèves (écrit : collège / oral : PRE)
– ligne spécifique ajoutée sur le bulletin des élèves
– ateliers PRE relocalisés dans l’enceinte du collège
– bilans PRE / collège
– liaison CM2-6ème améliorée permettant de regrouper les élèves
Pour la rentrée 2014 :
Retrait du PRE au collège car les 9h « gens du voyage » vont devenir à la rentrée des heures FLE exclusivement. Le droit commun est maintenant suffisant et le PRE n’a plus légitimité à intervenir. Les ateliers PRE sont donc maintenus seulement en maternelle et primaire.
Les leviers :
– La présence de l’Inspectrice d’académie adjointe au conseil consultatif
– Présence de professeurs de FLE diplômées recrutées par le PRE (budget correspondant + validation par la Conseil Consultatif)
– Bonne qualité du partenariat entre PRE et collège
3. Regard extérieur sur les expériences
Présentée dans le cadre d’un atelier lors d’une journée consacrée à la mobilisation du droit commun dans le domaine de l’éducation, l’expérience de Saint Jacques de la Lande a suscité un certain nombre de réflexions :
- Le Comité de Pilotage peut s’avérer une instance stratégique pour interpeller les politiques de droit commun. La présence du niveau hiérarchique est décisive (l’inspecteur d’académie notamment) pour infléchir sur le fonctionnement des institutions.
Certains PRE n’ont toutefois pas de Comité de Pilotage. - La proximité du dispositif est un atout pour identifier les besoins insatisfaits (dans le cadre du FLE, des ressources existent sur l’agglomération mais les familles sont peu mobiles)
- Le PRE joue un rôle de sas en attendant que le droit commun se mobilise. Mais cela passe par un « bricolage » (affection d’heures « gens du voyage).
La fonction que certains initialement prêtaient au dispositif PRE –faire évoluer les pratiques institutionnelles, semble avoir été perdue de vue car les systèmes ont beaucoup de mal à changer.
Pour que le dispositif soit à même de jouer sa fonction d’interpellation, une organisation transversale de la collectivité apparaît nécessaire. Elle donne une assise et une légitimité vis-à-vis des organisations publiques. L’exemple de Saint Nazaire est cité en ce sens, ou le dispositif est également reconnu par l’Etat (formations communes existantes)
Crédit photos : Angers Loire Métropole / Ville de Saint-Jacques-de-la-Lande
Date de mise à jour de la fiche expérience : août 2014